LES MERVEILLES DE L'INDUSTRIE.

tome 3, chapitre XXXVIII.

Les eaux de Versailles, la machine de Marly, sa construction sous Louis XIV, sa restauration sous Napoleon III.
 


 

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La ville de Versailles est alimentée en eaux potables par l’eau de la Seine que lui apporte la machine de Marly, restaurée en 1800, par les soins et aux frais de l'’empereur Napoléon III.
Mais telle n'était pas dans l’origine la destination de la machine de Marly. Louis XIV avait fait construire ce volumineux système de pompe « qui buvait l’'eau de la Seine, » comme on l'’a dit, dans le seul but d'apporter aux bassins de Marly et de Versailles les masses d'’eaux qui étaient nécessaires aux jeux hydrauliques, cascades et effets aquatiques semés avec profusion dans cette résidence royale. Au XVII siècle, sous le grand roi, on songeait peu aux besoins du public en eaux potables. Tandis que des masses d’eaux inondaient les parcs et les jardins de Versailles et de Marly, la ville proprement dite devait se contenter des eaux blanchâtres et impures de quelques étangs dans lesquels on avait rassemblé les eaux d'’infiltration des coteaux environnants. Ce n'’est que dans notre siècle que la machine de Marly, dûment restaurée, a été consacrée à fournir l'’eau de la Seine, tout à la fois à la ville de Versailles, pour son alimentation, et aux jardins des parcs de Versailles et de Marly, pour leur embellissement. Il n'est pas sans intérêt de connaître toute cette histoire

On sait que Louis XIV ayant décidé, en 1662, de faire bâtir dans la forêt de Marly un château royal dans une des situatinns les-plus belles du monde, l’'architecte Mansard traça des jardins magnifiques, qui réunissaient tout ce que l'’imagination pouvait désirer. Exposition heureuse, vue ravissante verdure et perspective variée, tout se trouvait rassemblé dans cet Éden royal. Il n'’y manquait qu'’une chose : de' l’eau. Et comment se passed'eau dans ces jardins que l'’on voulait rendre féeriques ? Comment alimenter ces nombreuses cascades aux gerbes jaillissantes ? On vit alors éclore une foule de projets pour amener d’abondantes eaux sur les hauteurs de Versailles.
Le plus gigantesque de ces projets fut celui que proposa Paul Riquet, l'illustre créateur du canal du Midi. Riquet voulait amener la Loire à Versailles. Le simple aperçu de la hauteur du lit de la Loire au dessus du lit de la Seine, avait suggéré à Biquet ce projet, qui ne put résister à l’'examen qu'’en fit l’abbé Picard. Ce physicien reconnut que la Loire, qu’'il fallait prendre à la Charité, ne pourrait arriver A Versailles, parce que les plateaux de la Beauce n'’étaient pas à la hauteur nécessaire pour l’'établissement d’'un canal.
On songea alors à tirer parti des eaux souterraines fournies par les environs de Versailles. Près de Trappes et de Bois-d’'Arcy étaient deux dépressions plus élevées de 5 mètres et de 8 mètres que le réservoir de la Tour. On barra ces vallons, pour y arrêter et y accumuler les eaux fournies par les plateaux supérieurs dans leur cours naturel vers la Bièvre. De nombreux canaux furent creusés et permirent de diriger l’eau dans les nouveaux étangs.
En 1675 les eaux d'’infiltration remplissaient les étangs de Versailles. Toutefois, leur teinte blanchâtre les empêcha de servir aux usages domestiques. Et comme les eaux de source gui suffisaient au village et au château de Versailles étaient devenues inssuffisantes depuis que Versailles était devenue une ville, on recueillit et on amena dans la plaine toutes les eaux qui descendaient des collines situées au nord et à l’ouest de la nouvelle ville. Le produit des sources du nord fut dirigé vers Trianon et amené de là au château, tandis que les eaux
de l'’ouest, c'’est-à-dire celles qui étaient recueillies à Saint-Cyr, furent reçues dans lebassin de Choisy,  pour alimenter la ménagerie. Mais le volume d’'eau ainsi rassemblé étail tout à fait insuffisant pour fournir aux énormes dépenses hydrauliques projetées.
Louis XIV fit alors venir son architecte Mansard, et Colbert son ministre.
« La Seine est à une lieue d'’ici, au bas du coteau de Louveciennes, dit le roi ; faites lui escalader le coteau ; vous établirez là un réservoir et un aqueduc. Quant à la machine qui doit faire monter l’'eau de la Seine, demandez-la aux savants de France.
– Je m'adresserai demain aux savants de France, répondit Mansard," et l'eau montera jusqu’au ciel s’'il plaît à Votre Majesté. »
Un gentilhomme des environs de Liege, le baron de Ville s’était fait une grande réputation en Hollande en inventant une très-belle machine pour l'’élévation de l’'eau. Mansard fit venir à Versailles ce savant homme. Après avoir reconnu les bonnes qualités du système que le baron de
Ville proposait pour élever l’'eau de la Seine jusqu'’au sommet du coteau de Louveciennes, il lui confia l'’exécution de cette machine.
 

Le baron de Ville amena avec lui un charpentier de Liége, Rannequin Swalem, et il l’'attacha à la construction de la machine hydraulique. Rannejuin Swalem resta conducteur de la machine de Marly jusqu’'à sa mort.
Les avis sont parlagés sur la part relative de mannequin Swalem et du baron de Ville dans l’'exécution de ce grand tràvail, Bélidor, dans son Traité d’'architecture hydrauliqne publié en 1739, présente Rannequin comme le veritable inventeur ; mais les ecrivains contemporains ont écrit le contraire.
la machine exécutée par le baron de Ville et Rannequin, commença à fonctionner en 1682. Elle avait coùté plus de 8 millions, ce qui éguivaudrait à une somme triple aujourd’hui.
Le baron de Ville et Rannequin avaient pris une grande partie de l’'eau de la Seine pour l'’élever à Marly. Pour cela, ils avaient réuni, par un barrage commun, les diverses îles qui existent entre Bezons et Marly, et fermé ce bras par des vannes, vers son extrémité inférieure. Ils purent ainsi mettre en mouvement 14 roues d’'environ 12 mètres de diamètre, dont les arbres armés de manivelles faisaient mouvoir 211 pompes aspirantes et foulantes étagees sur le flanc du coteau. Les pompes inférieures, au nombre de 64, envoyaient les eaux par 5 conduites dans un premier réservoir situé à 50 mètres environ au-dessus de la Seine. Là elles étaient reprises par 79 autres pompes, qui les portaient dans un second réservoir situé à 50 mètres plus haut. De ce second réservoir, elles étaient élevées par une troisième série de 78 pompes, à 155 mètres au-dessus du niveau de la Seine. Là se trouvait une tour qui formait le point de départ de l’aqueduc de Marly et qui était à plus de 1200 mètres au-dessus de la rivière. c'était un véritable tour de force pour l’art mécanique du XVIII siècle.
 


 

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Les pompes des deux étages supérieurs recevaient le mouvement de l’'eau, au moyen de tringles disposées suivant la pente du coteau et reliées, par des boulons, à des supports oscillants, dit "varlets", fixés au sol.
En réunissant toutes les pompes que nous venons de mentionner, on trouve que le nombre total des pompes employées pour élever l’eau au sommet de l'’aqueduc de Marly, atteignait, comme nous l’'avons dit, le chiffre de 211.
Les eaux, ainsi élevées, se rendaient par l’'aqueduc, soit au château d’eau de Marly, soit à Versailles.
Pour arriver à Versailles, elles suivaient l’'aqueduc dit de Marly qui existe encore. Cet aqueduc, qui a 6,200 mètres de longueur, sert aujourd’hui, comme au siècle dernier, à porter dans le réservoir de la butte de Picardie, les eaux des machines actuelles.
Cependant, le « monstre de Marly », comme on l’'appelait, ne put jamais fournir à Versailles qu'’un volume d'’eau assez restreint. C'’est que la force motrice de cet énorme assemblage était en très-grande partie absorbée par les frottements des balanciers et des bielles, qui transmettaient la force des roues aux pistons des deux étages de pompes échelonnées sur les flancs du coteau. On prétend que le volume élevé par les pompes était à l’origine de 5,000 mètres cubes d'’eau en vingt-quatre heures, mais il diminua rapidement par l'usure des pièces, et ayant perdu les 5/6 de sa puissance, il ne put suffire à tous les besoins auxquels on avait espére satisfaire.
La machine de Marly etait une oeuvre gigantesque, mais ses grandes dimensions et la multiplicité de ses pièces mobiles entraînaient beaucoup d’'inconvénients et de désordres. Lorsque Bélidor écrivait son Traité d’'hydraulique, c’est-à-dire en 1739, la machine était dejà en partie épuisée, et les réparations coûtaient des sommes enormes. On chercha, mais en vain, à exciter le zèle des ingénieurs par des promesses, par des offres magnifiqnes, pour essayer de lui apporter des perfectionnements devenus indispensables. Mais on ne put réussir à remettre le monstre hydraulique en bon état.
Pendant pres d’'un siècle la machine de Marly fut abandonnée. Elle fut même un moment vendue, puis rachetée. Elle était finalement au moment d'’être demolie, lorsqu’en 1803, Napoléon 1er, s'’occupant de relever Versailles de ses ruines, porta son attention sur ce monument délabré. Il le trouva dans l’'état le plus déplorable. La machine de Marly n’'élevait plus que 240 mères cubes d'’eau par vingt-quatre heures.
Une commission nommee par le ministre pour examiner les moyens propres a améliorer la machine de Marly, proposa de la detruire et d’'établir de nouvelles pompes disposées de manière à élever d’'un seul jet 600 pouces d'’eau da la Seine à une hautenr de 83 mètres. On aurait employé une partie de cette eau à mettre en mouvement une seconde roue qui aurait éleve 50 pouces d’'eau jusque dans la cuvette de l'’aqueduc de Marly. C'était 'l’ancien système restauré.
Un arrêté des consuls ordonna la construction de cette nouvelle machine, qui fut mème adjugée. Mais son exécution fut abandonnée, à la suite d’'une proposition nouvelle qui démontra que l’'on pourrait resoudre le problème d’une manière plus satisfaisante. Un entrepreneur de charpente, nommé Brunet, proposa d'’élever les eaux d’'un seul jet, au sommet de la tour de Marly. C’est ce que l’'on n’avait jamais osé tenter jusque-là, parce que l'’on craignait la rupture des tuyaux.
Le projet de Bnunet ayant été approuvé, une des roues fut mise à sa disposition. ll monta sur un arbre de couche deux manivelles, au moyen desquelles il mit en mouvement quatre pompes aspirantes et foulantes. L’eau refoulée servait à comprimer de l’air dans un réservoir, afin d'obtenir un mouvement régulier d’ascension dans la conduite.
En septenibre 1804, la machine, ainsi disposée, fut mise en marche. Les eaux s’'éleverent d’'un seul jet jusqu'’à l’'aqueduc, et l’on constata que l'’on obtenait ainsi deux fois plus d’'eau qu’avec l'’ancien système.
Cependant le projet de Brunet ne fut pas exécuté dans son entier. On ne s’'occupa point à transformer de la même manière les treize autres roues. C'est que les frères Perrier, les constructeurs de la pompe à feu de Chaillot, s’'étaient presentés annonçant qu'ils elèveraient l’eau avec deux machines à vapeur.
Les travaux commencèrent sous la direction des frères Perrier, mais ils ne tardèrent pas à être abandonnés. Un autre système de machine à vapeur fut adopté. Sur le rapport d’une Commission composée d'ingénieurs et de membres de l'’institut, on arrêta définitivement le projet d'’une machine à vapeur très-différente de celle de Perrier.
Cependant, comme l’'exécution de cette machine à vapeur demandait un temps assez considérable, et que l’'ancienne distribution devenait de plus en plus insuffisante, les constructeurs firent adapter à deux des anciennes roues des pompes disposées dans un système analogue à celui de Brunet. Ce système nouveau fut mis en marche pour la première fois en 1817, et il fonctionna jusqu’en 1858. Les deux roues de l’'ancienne machine suffisaient pour assurer le service, lorsque les eaux de la Seine se trouvaient à un niveau favorable pour la marche de ses roues. La machine à vapeur était mise en marche lorsque la machine hydraulique était arrêtée ou lorsqu’elle ne suffisait pas aux besoins de la consommation de la ville de Versailles. Cette machine a vapeur etait d'’un grand secours, puisqu’elle pouvait fournir à elle seule environ 1800 mètres cubes d’eau en vingt-quatre heures, c’est-à-dire près des deux cinquièmes du volume nécessaire, Seulement elle Consonsommait une telle quantité de combustible, qu’elle devenait ruineuse. Le prix de revient de l’'eau qu’elle fournissait n’était pas moindre de 23 centimes par mètre cube.

L’'étabiissement d’'un moteur à vapeur à côté d'’une force hydraulique était évidemment une superfétation, une anomalie que l'’on ne comprenait pas, et qui ne s’'explique que par la circonstance tout à fait exceptionnelle du projet qui existait alors, de supprimer le barrage de la Seine, c’'est-à-dire d'’anéantir l’'usine hydraulique de Marly, que l’'on trouvait nuisible à la navigation.
Cependant ce barrage ne fut pas détruit, par suite de l’'établissement d’'un barrage mobile, qu'’exécuta en 1838 à Bezons, un des plus habiles et des plus savants ingénieurs de notre époque, M. Poirée, qui a rendu à le navigation de la Seine les plus grands services.
Ce barrage et les digues de Carrières, Chatou et Croissy, ainsi que l’'écluse de comunication établie entre les deux bras du fleuve, rendirent la navigation de la Seine complétement indépendante et permirent de laisser intacte la chute de la Seine creee sous Louis XIV, pour fournir la puissance motrice nécessaire à la machine hydraulique de Marly, qui fut ainsi sauvée de la destruction qui la menaçait.
On pouvait alors songer à améliorer et à rendre utile la machine de Marly. L’'empereur Napoléon III eut la gloire de mener cette entreprise à bonne fin. Il chargea M. Dufrayer, directeur du service des eaux de Versailles, de rechercher les moyens de réparer la machine de Marly et de tirer un meilleur parti de la chute d’'eau. Divers projets furent successivement examinés, et sur l'avis d’une commission composée de savants et d'ingénieurs dont V. Regnault,membre de l'’Institut, était le rapporteur, Napoléon III décida, en 1854, l’'exécution de la machine qui fonctionne aujourd’hui pour elever l'’eau de la Seine à Versailles et à Marly.
Nous pourrons donner une description exacte de cette belle machine hydraulique d’'après la notice rédigée pour l’'Exposition universelle de 1867, par M. Dufrayer, directeur du service des eaux de Versailles et de Marly.
La nouvelle machine hydraulique est établie a peu près sur le même emplacement que l’'ancienne; seulement elle se compose de 6 roues au lieu des 14 roues de l’'ancienne machine. Malgré cette addition, la machine occupe beaucoup moins d'’étendue. Les quatorze roues de l'’ancienne machine ne donnaient pas, lorsqu’'elles se trouvaient dans le meilleur état, un rendemement égal à celui que donnent aujourd’hui les trois premières grandes roues qui ne dépensent pas la moitié de la force disponible.
Ces roues sont, en effet, exécutées dans d’excellentes conditions. Au lieu de fonctionner, comme les anciennes, par le simple courant de l’eau, elles sont emboîtées à leur partie supérieure dans un coursier circulaire.
 

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Le bâtiment dans lequel se trouve tout le système, Contient six grandes roues, et par conséquent, six mécanismes semblables.
Chaque roue se compose de 64 aubes planes, formées de fortes planches en bois d’orme, assemblées entre elles et fixees par des équerres en fer, à deux rangées de couronnes concentriques, au nombre de quatre sur la largeur, qui opèrent la reunion de toutes les aubes. Elles sont en outre reliées à la circonférence extérieure et aux deux bouts par des boulons à écrous ; 32 aubes ont 4m,50 de longueur sur 3 mètres de largeur, tandis que les 32 autres n’ont, avec la même longueur, quo 2m,40 de largeur.
L’'arbre de transmission repose sur deux larges paliers fixés sur une plaque de fondation en fonte, solidement attachée au sol au moyen de boulons de scellement.
Les vannes, pour une largeur de roue aussi considérable, sont forcément d’un grand poids. Pour réduire ce poids autant que possible, tout en conservant la force de résistance nécessaire à l'effort qu’elles ont à supporter, ces vannes ont été exécutées en forte tôle avec des cloisons ou nervures. Pour les déplacer dans leurs guides latéraux inclinés, un mécanisme spécial est disposé sur le plancher au-dessus de chacune d’elles.
Le mecanisme servant à la manceuvre des vannes est un treuil composé d’un bâti en fonte reuni par des entre-toises et muni d’un arbre à manivelle, sur lequel est fixé un pignon. Celui-ci engrène avec une roue calée sur un arbre intermédiaire supporté également par le bâti, et garni d’un pignon qui commande une roue dentée fixée sur un arbre.
Cet arbre est supporté par de petites consoles unies au bâti, et repose, par ses extrémités prolongées dans toute la longueur de la vanne, sur des petits supports fixés au sol. Deux pignons sont clavetés vers ses extrémités et engrènent avec des crémaillère attachées à la vanne, de telle sorte que, lorsqu’on agit sur la manivelle du treuil, on communique à cette vanne un mouvement ascensionnel ou descensionnel, suivant le sens de rotation, et cela très lentement, par suite des rapports qui existent entre les engrenages de la transmiision.
Pour éviter que des matières solides, èntraînees par le courant de la Seine, arrivent sous les roues, un large grillage de fer est placé en travers du canal d’arrivée.
Les pompes réalisent le meilleur emploi de la force du courant, et c’est là une des meilleures dispositions imaginées par M. Dufrayer, l’habile ingénieur à qui l’on doit la reconstruction de la machine que nous décrivons.
Chaque roue met en jeu quatre pompes horizontales à piston plongeur à simple effet. Ces pompes se composent chacune d’un cylindre en fonte, de 0m,45 de diamètre extérieur fixé dans un bâti de fonte.
Ce dernier, formé de deux flasques fondues avec des nervures qui les relient entre elles, est boulonné solidement au sol et assemblé par de forts boulons avec la plaque de fondation sur laquelle est fixé le palier correspondant de l’arbre de la roue.
Le bâti de la pompe placée de l’autre côté, dans le mème axe, étant également relié à cette plaque, l’ensemble d’un double jeu de pompe se trouve ainsi solidaire, et présente par suite toute la solidité nécessaire.
Dans ce corps de pompe se meut un long piston creux en fonte, ajusté à frottement doux dans la presse-étoupe, serré par huit boulons et garni au fond d’une bague en bronze.
A la tête du piston est clavetée une chape dont les deux branches sont traversées par un petit arbre en fer forgé et tourné, garni à ses deux extrémités de longs coulisseaux en bronze, destinés à se mouvoir horizontalement dans les glissières en fonte boulonnées et clavetées sur le bâti même de la pompe, c’est une disposition analogue à celle qui est employée pour guider la tige du piston des machines à vapeur horizontales.
Le mouvement est communique directement aux pistons de quatre pompes à la fois, par l’arbre de chaque roue hydraulique, garni à cet effet, des deux côtés, en dehors des paliers qui les supportent, de deux fortes manivelles de 0,80 de rayon, calées à angle droit.
Sur le bouton de chaque manivelle sont ajustées les têtes des deux bielles en fer forgé ; l’une de ces tètes est à fourche pour laisser place à la seconde. Ces bielles n’ont pas moins de 3,40 de longueur.
Le corps de pompe est fondu, du côté opposé au presse-étoupe, avec une sorte de boîte à deux tubulures perpendiculaires à son axe ; celle du dessus est fermée par un fort couvercle qui sert à visiter la pièce et, au besoin, à la réparer.
Quand le tuyau d’aspiration se remplit par l’afflux de l’eau, deux clapefs en bronze dont le piston est muni, descendent entièrement et s’appuient sur un siége en bois d'orme, qui assure l’herméticité de la fermeture. Alors deux autres clapets s’ouvrent pour laisser l’eau aspirée s’échapper par la conduite de refoulement.
Ces clapets sont en bronze, avec garniture en cuir, pour s’appliquer exactement et sans bruit sur leur siége en bronze, à face inclinée, à l’extrémité du corps de pompe.
A la suite de la boîte munie des clapets de refoulement, est un robinet-vanne, qui permet au besoin, quand l’une des pompes
est en réparation, d’interrompre la communication de cette pompe avec les deux conduites collectives.
Les réservoirs d’air qui sont aujourd’hui adjoints à toutes pompes servant à l'élevation de l’eau, sont placés sur toute la longueur du bâtiment, près des murs, sous une galerie en fonte avec balustrades et candélabres, qui permet de circuler tout autour de la salle. Cette galerie communique avec un grand reservoir en fonte qui est place au bout de la salle, et s’elève jusqu’à la toiture. Une seconde galerie et un second réservoir à air existent symétriquement de l’autre côté de la salle. On sait que les réservoirs à air ont pour but de régulariser, par l’égalité de la pression qu’exerce l’air comprimé, le mouvement de l’eau dans la conduite ascensionnelle, et d’éviter ainsi les coups de belier qui se produisent dans certaines circonstances, par la fermeture instantanée des clapets des pompes.
L’air est entretenu dans les réservoirs d’air comprimé au moyen d’un petit appareil très simple, appliqué sur les couvercles des boîtes à clapet d’aspiration. Cet appareil se compose d’une petite cloche en fonte, montée sur un robinet en bronze, vissé sur le couvercle. La bride de ce robinet, sur laquelle repose la cloche, est percée de petits trous fermés par un disque en cuir, qui est maintenu au centre par une vis, afin que sa circonférence puisse se soulever sous la pression de l’air refoulé par le piston de la pompe. l’air est introduit dans le corps de pompe, à chaque aspiration du piston, par un petit tube placé sur le tuyau d’aspiration, et muni d’un robinet que l’on ferme, quand on s’aperçoit, en examinant des robinets étagés sur le réservoir, que la quantité d’air refoulé est suffisante.
Chaque série de deux pompes est pourvue d'un petit appareil semblable.
L’air, refoule dans tous les appareils, est amené dans un tube a l’intérieur du réservoir. ll y acquiert une pression de 16 à 17 atmosphères, c’est-à-dire un peu supérieure a celle de l’eau dans la conduite générale.
Celle-ci est en communication directe avec les réservoirs d’air par des tuyaux passant sous la voûte, et venant s’assembler sur une tnbulure ménagée à chacun des petits réservoirs intermédiaires en tôle.
La prise d’eau par les pompes a été installée avec des précautions toutes particulières. Le bâtiment des pompes est placé en travers de la Seine. Entre chacune des six galeries, de 4m,50 de largeur, qui reçoivent les roues et leur vannage, on a ménagé, ainsi que vers les deux extrémités, huit canaux destinés à laisser arriver l’eau nécessaire à l’alimentation de toutes les pompes, lesquelles sont placées directement au-dessus. Leurs tuyaux d’aspiration y descendent par des ouvertures rectangulaires ménagées, à cet effet, dans l’épaisseur des voûtes.
Ces canaux, traversant le bâtiment d’outre en outre, laisseraient s’écouler un volume d’eau qui affaiblirait considérablement la chute s’ils n’étaient fermés en aval par une vanne qui maintient le niveau du liquide. En amont, il existe une vanne semblable, et devant celle-ci une grille, qui ne permet pas aux herbes ou autres matières étrangères charriées par le flenve, de pénétrer dans le canal de prise d’eau.
Un mécanisme très facile à manoeuvrer, est appliqué à l’intérieur du bâtiment, pour manoeuvrer ces vannes. 11 se compose d’une vis et d’un écrou muni d’une roue à rochet à double encliquetage que l'on met en jeu a l’aide d’un levier. Ce double encliquetage avec arrêt en sens inverse, permet de maintenir la vanne à toutes hauteurs, soit qu’on veuille la soulever, soit qu’on veuille la faire descendre.
De la chambre des roues partent deux conduites de fonte,qui montent à découvert, appuyées sur le sol, jusqu’à l’aqueduc de Marly. Arrivées au pied de l’aqueduc, qui n’a pas moins de 6,200 mètres de long, les eaux s’élèvent verticalement dans la conduite jusqu’à son sommet, et le parcourent dans une cuvette en plomb placée sur son couronnement. Parvenue à l’extrémite de l’aqueduc, l'eau pénètre dans un tuyau placé sous terre, et qui, se recourbant en siphon, la conduit à Versailles, aux réservoirs des Deux-Portes.
L’aqueduc de Marly est sans doute très monumental, mais il est tout à fait superflu, au point de vue hydraulique. Il y aurait avantage à le supprimer et à établir une conduite qui irait de la chambre des roues motrices de la machine de Marly aux réservoirs de Versailles. On ne le conserve que par l'intérêt qu’il présente comme monument historique, comme rappelant, par son côté architectural, le siecle de Louis XIV ; mais au point de vue des services réels qu'il rend, comme conduite d’eau, l’aqueduc de Marly est plus nuisible qu’utile. Sans supprimer ce joli monument architectural, qni semble faire partie du paysage sur le coteaux de Marly, on pourrait le retirer du service actif et le remplacer par une conduite de fonte, facile à visiter, à entretenir et à réparer. Ce n’est peut-être pas l’avis des peintres ni des habitants du pays, mais c’est l’opinion des ingénieurs.
 
 

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